L’égo s’incline devant la solidité du lien collectif, laissant ainsi émerger une puissance supérieure unie pour le bien-être de tous ses partis. C’est l’éveil d’une conscientisation, l’intégration d’une conception nouvelle, celle d’une forme-pensée qui dort en chacun de nous : les trois mousquetaires. Un pour tous et tous pour un.

 

« Moi qui vient d’Afrique et qui suis psychologue, je fais tout mon possible, mais j’ai du mal… J’ai du mal à comprendre les gens ici, en Amérique du Nord, qui veulent se suicider. Moi, d’où je viens, les gens n’ont rien. Ils luttent tous les jours pour survivre, ne sachant pas s’il y aura un lendemain. Malgré ça, ils cultivent la vie. Ils ne pensent pas à se l’enlever. »

Lors de notre dernière rencontre sur la roue de médecine autochtone, Nadeije, notre enseignante, nous répétait les paroles de cet homme qu’elle côtoie.

Une planète, deux continents, deux réalités… Ils ont peu, mais ils ont quelque chose de très puissant, quelque chose que nous avons négligé en nous isolant entre quatre murs : la tribu.

Dix personnes se suicident chaque jour au Canada. Chez les adolescents et les jeunes adultes, le suicide demeure la deuxième cause principale de décès. (RADIO-CANADA)

Peut-on faire un lien avec l’explosion des technologies?

Pour la majorité d’entre nous, le cellulaire est devenu notre plus fidèle compagnon de vie. La nuit, il repose à nos côtés. Au réveil, on s’empresse de vérifier nos messages. Il ne nous quitte pas. Et le quitter il est hors de question. Comme un fumeur et son paquet de cigarettes.

Consoles portables, tablettes, ordinateurs… Ils sont utiles pour le boulot, les emails, le shopping en ligne, les photos, le GPS, les jeux, les films, les vidéos, le chat et bien sûr, les médias sociaux… sans mentionner les applications!

Selon les statistiques, en mars 2017, les utilisateurs d’Android étaient en mesure de choisir parmi 2,8 millions d’applications. Les utilisateurs d’Apple, pour leur part, avaient accès à 2,2 applications. (STATISTA)

Je ne peux faire autrement que de me demander : menons-nous une vie virtuelle?

Comme le soleil qui disparaît derrière la lune, nous cachons-nous derrière nos écrans; l’éclipse d’une vie illusoire, isolée, absente d’existence (comme l’exprime la définition même du terme virtuel)? Avons-nous remplacé notre lumière naturelle par une source artificielle, inévitablement vouée à s’éteindre, à nous éteindre?

APPARTENIR, UN BESOIN FONDAMENTAL

Le concept SCARF développé par l’Institut de Neuroleadership fait état des cinq besoins fondamentaux de l’humain avec, en quatrième position, le besoin d’appartenance. La fameuse pyramide de Maslow quant à elle positionne le besoin d’appartenance au centre des besoins fondamentaux, et pour cause… Selon un rapport de recherche d’Harvard, les liens sociaux forts pourraient promouvoir la santé du cerveau…

Quand on entre en relation avec une autre personne, le cerveau sécrète une plus grande quantité d’ocytocine, neurotransmetteur et hormone souvent surnommée « l’hormone de l’amour ». Plus l’ocytocine est produite, plus développé est le comportement affectif. (NEUROLEADERSHIP JOURNAL)

C’est la même chose avec Facebook. Voir un joli visage en photo libère de la dopamine, un neurotransmetteur qui commande le système de gratification du cerveau, provoquant ainsi une sensation de bien-être ― tout comme le fait de déguster de la bonne nourriture, de gagner de l’argent, d’avoir des relations sexuelles ou encore, de consommer de la cocaïne!

Lorsqu’on se sent soutenu, valorisé, aimé, notre cerveau libère beaucoup de dopamine et d’ocytocine. Dans une nouvelle étude publiée par Nature Neuroscience, on relate même que le nombre d’amis Facebook corrèle avec la taille de l’amygdale, également appelé « cerveau émotionnel ». Et nous ne sommes pas les seuls! Chez les primates, il existe une relation entre le volume du néocortex, celui du néocortex frontal en particulier, et la taille du groupe social.

Facebook trompe notre cerveau en nous faisant croire que nos proches nous entourent, ce qui était historiquement essentiel à notre survie. Le cerveau humain, parce qu’il a évolué des milliers d’années avant la photographie, échoue à plusieurs niveaux pour reconnaître la différence entre les images et les gens.
― Eva Ritvo, M.D., Psychology Today

TOUT CE QUI MONTE FINIT PAR DESCENDRE

C’est la loi de Murphy. Tout comme le pendule qui bascule vers une extrémité est automatiquement ramené à l’autre extrémité. Les réseaux sociaux ont plusieurs avantages… quand on évite de tomber dans l’excès.

Pour plusieurs, ne pas avoir de compte Facebook signifie ne pas exister. Il sert à définir son lien social. La popularité passe par son nombre d’amis. Et lorsque les usagers ne reçoivent pas de commentaires, ou que ces derniers sont négatifs, leurs émotions peuvent être négativement affectées.

Des études ont en effet analysé les médias sociaux et leurs effets sur le bien-être et la santé des jeunes. L’une d’entre elles a démontré que les étudiants universitaires au premier cycle qui utilisaient fréquemment Facebook étaient plus enclins à être en accord avec la déclaration « la vie est injuste ». Il a également été observé que le temps passé en ligne corrélait significativement avec le niveau d’anxiété. La recherche a établi des liens entre l’utilisation de Facebook, un état de bien-être et d’estime de soi moindre, un sentiment accru de dépression, du stress ainsi qu’une surcharge cognitive et une insatisfaction corporelle chez les utilisateurs qui, à la base, étaient en bonne santé. (CYBERPSYCHOLOGY)

Ils ont 2 000 amis Facebook, mais quand vient l’temps de déménager, y’en ont pu un cr***!
― Jacques (Michel Côté) dans De père en flic 2

Et ces faits ne s’appliquent pas qu’aux jeunes. Trois adultes sur quatre sont en accord avec la déclaration « les Américains souffrent de la faim du toucher (de l’anglais touch hunger, aussi souvent appelé skin hunger (la faim de la peau)) ».

Même si les amis Facebook sont nombreux, le sentiment de solitude n’a jamais été aussi fort chez plusieurs individus. Chez les adultes américains, il a augmenté de 16 % au cours de la dernière décennie. Les gens souffrant de la faim du toucher sont moins heureux, plus seuls, plus enclins à expérimenter le stress, l’anxiété et la dépression et sont généralement en moins bonne santé. (PSYCHOLOGY TODAY)

Plus on passe de temps sur Internet, moins nombreux sont les contacts physiques (lire aussi L’art oublié de terminer). Toucher et être touché est un besoin viscéral qui ne peut être comblé par les réseaux sociaux. Car même si Facebook est une communauté, elle demeure virtuelle. La tribu, elle, est réelle.

L’évolution harmonieuse de la personne s’inscrit dans une démarche communautaire. La véritable communauté répond à tous les besoins de l’humain. Elle lui donne affection, compréhension, éducation, travail, nourriture, abri et vie spirituelle. Au besoin, elle l’encourage par une tape sur l’épaule ou un coup de pied au derrière! Mais surtout, elle lui enseigne l’amour et le partage.
― Aigle Bleu, tiré de L’héritage spirituel des Amérindiens

N’avons-nous pas aujourd’hui, plus que jamais dans l’histoire de l’humanité, besoin de retrouver nos véritables sources?

TROUVER SA TRIBU : PASSER DU JE AU NOUS

Trouver sa tribu, c’est comme retrouver sa famille d’âme. Elle est synonyme de connexion profonde, d’authenticité, de communauté, d’identité. On redécouvre notre lumière naturelle : le soleil nous libère de l’isolement. La quantité des relations Facebook ne fait pas le poids contre la qualité des liens et des échanges qui existent entre les membres de la tribu. Elle est là dans les bons moments, comme dans les moins bons. Nous en faisons partie, tout comme elle fait partie de nous. Nous l’habitons, tout comme elle nous habite.

Trouver sa tribu, c’est se réconcilier avec le pouvoir d’une force tranquille : celui du groupe au service d’une cause plus grande que soi. L’égo s’incline devant la solidité du lien collectif, laissant ainsi émerger une puissance supérieure unie pour le bien-être de tous ses partis. C’est l’éveil d’une conscientisation, l’intégration d’une conception nouvelle, celle d’une forme-pensée qui dort en chacun de nous : les trois mousquetaires. Un pour tous et tous pour un.

Chaque goutte d’eau, vaine à elle seule, s’unit aux autres pour former la plus puissante des sources : la vie elle-même. La division n’a simplement plus sa place.
― Tiré de Totum : l’éveil du pouvoir

LA TRIBU CHEZ LES FEMMES…

Alors que dans la majorité des pays développés les femmes s’isolent à la maison, elles vivent en communauté, en sororité, dans plusieurs autres cultures. Les traditions comme la loge lunaire ont ainsi permis aux femmes de se rassembler et de se retrouver pendant leurs règles.

Une étude d’Harvard a d’ailleurs démontré que les femmes qui entretiennent d’étroites amitiés entre elles demeurent en meilleure santé et plus heureuses en vieillissant. En 2006, une étude sur le cancer du sein  a établi que les femmes qui ont des amies proches ont quatre fois plus de chance de survivre à la maladie. (UPLIFT)

L’amitié entre femmes est juste un saut vers notre sororité, et la sororité peut devenir une force très puissante.
― Jane Fonda

 

La tribu nous voit et nous accepte tels que nous sommes, sans flaflas ni artifices. Elle préfère notre saveur originale, l’Être, à tous nos parfums artificiels. Elle sait des choses que nous-même ignorons à notre sujet. En quelque sorte, elle est notre gardien, différenciant sagement le faux du vrai.

Comment pouvons-nous créer l’esprit communautaire en nous et autour de nous? Commençons par nous regarder. Quelle est notre relation avec nous-mêmes? Est-ce que nous nous comprenons? Poursuivons-nous des buts qui sont en accord avec notre nature profonde?
― Aigle bleu, tiré de L’héritage spirituel des Amérindiens

Une puissance ancestrale demande à s’éveiller, la force de la tribu cogne à nos portes, nous invitant à sortir, à redéfinir notre mode de vie, à nous retrouver. Redécouvrons le monde et ses vrais couleurs, sans filtres ni retouches. Pur, authentique, naturel.